RUE CASES NÈGRES
LONG MÉTRAGE
1983
SYNOPSIS
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A 6000 kilomètres de la métropole qui prépare l'exposition coloniale de 1931, la Martinique vit à l'heure des vacances d'été. Au milieu de la plantation, la Rue Cases-Nègres : 2 rangées de cases de bois désertées par les adultes partis travailler dans la canne à sucre sous le contrôle des économes et des commandeurs. Parmi les enfants qui passent leur été à s'amuser, se trouve José, 11 ans, orphelin, élevé avec fermeté et amour par M'an Tine sa grand-mère. Bientôt la vie séparera les enfants au gré de leurs succès ou de leurs échecs scolaires...
CRÉDITS
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Réalisé par : Euzhan Palcy
Écrit par : Euzhan Palcy
D'après : Sugar Cane Alley by Joseph Zobel
Musique : Groupe Malavoi
Direction photographie : Dominique Chapuis
Montage : Marie-Josèphe Yoyotte
Décors : At Hoang
Son : Pierre Befve
Costumes : Isabelle Filleul de Brohy
Production : Michel Loulergue, Alix Régis
Claude Nedjar, Jean Luc Ormières
Durée : 103 minutes
Pays : France (Martinique)
Langue : Français/Créole (sous-titré français)
Filmé sur pellicule 35 mm Fujicolor
DISTRIBUTION
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Garry Cadenat — José
Darling Légitimus — M'Man Tine
Douta Seck — Old Medouze
Joby Bernabé — Monsieur Saint-Louis
Francisco Charles — Boss
Marie-Jo Descas — La mère de Léopold
Marie-Ange Farot — Madame Saint Louis
Henri Melon — M. Roc L'instituteur
Eugène Mona — Douze Orteils
Joël Palcy — Carmen
Laurent Saint-Cyr — Léopold
BANDE-ANNONCE
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RUE CASES-NÈGRES
PRIX & RÉCOMPENSES
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2011 — Sélection officielle Cannes Classics - Festival de Cannes
1985 — Prix du Public (Festival Panafricain du cinéma de Ouagadougou)
Premier film à recevoir le prix
1985 — Black Filmmakers Hall of Fame Award
1984 — Houston International WordFest : Prix spécial du Jury
1984 — César de la meilleure première oeuvre*
1983 — Lion d'Argent - 40ème Mostra de Venise*
1983 — Nommé au Lion d'Or*
1983 — Coupe Volpi de la meilleure actrice*
1983 — Prix de l'Unicef
1983 — Prix de l'OCIC (Office Catholique International du Cinéma)
* Première fois pour un réalisateur noir
CÉRÉMONIE DES CÉSARS
DU CINÉMA
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César de la Meilleure Première Oeuvre. 1984
La 9e cérémonie des Césars du cinéma - dite aussi Nuit des César - récompensant les films sortis en 1983, s'est déroulée le 3 mars 1984 au théâtre de l'Empire à Paris. Elle fut présidée par Gene Kelly et retransmise sur Antenne 2 présentée par Léon Zitrone. Cette nuit, la réalisatrice Euzhan Palcy devint le premier noir (homme ou femme) césarisé et le premier afro-descendant à recevoir une haute distinction de son académie nationale de cinéma.
"La gagnante est Euzhan Palcy pour Rue Cases-Nègres !
Elle brille autant que le César !"
"J’essaierai de dire Je voudrais remercier au nom de tous les miens, tous ceux qui ont cru en moi et qui ont permis que ce film existe. Je veux parler de mes techniciens et de mes producteurs. Je remercie tout particulièrement les acteurs du film, la Martinique pour sa contribution multiforme et puis Monsieur Joseph Zobel, l’auteur du roman La Rue Cases Nègres, pour m’avoir fait confiance."

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Une belle histoire d’amour et d’espoir
Si le film a enthousiasmé Venise, c’est qu’il est plein d’une fraîcheur que beaucoup de nos cinéastes ont oubliée. Euzhan Palcy a simplement voulu raconter une belle histoire d’amour et d’espoir. Avec Darling Légitimus, admirable grand-mère, avec Garry Cadenat, José confondant de naturel, et tous leurs partenaires, elle a réussi à nous faire partager sa foi en la victoire possible des hommes sur le malheur.
— Robert Chazal / France-Soir, 21 septembre 1983

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Rue Cases-Nègres vibre et vit
Renoir aussi, pour portraitiser l’Inde, passa par l’enfance et la narration exemplaire. Il n’y a que les mauvais cinéastes pour fixer du gros oeil béat de leur caméra la plaie prétendument dénoncée. Un peuple et sa culture, un peuple et sa mémoire, même un peuple et sa misère demandent plus d’attention qu’un simple constat offusqué, aussi généreux fût-il.
Rue Cases-Nègres vibre et vit. Euzhan Palcy a retrouvé la chanson.
Il n’y manque ni une parole ni une note de musique.
— Claude Sartirano / L’Humanité-Dimanche, 30 septembre 1983

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Le trajet de la conscience d’un peuple
Le film illustre les trois étapes de l’expression de la conscience antillaise. La première est celle de la tradition orale, transmise dans le film, par Médouze ; la seconde est la tradition écrite, le message du vieillard passant dans le roman de Zobel ; la dernière étape est celle de l’expression filmique : le roman devient film ; et l’allusion à la salle de cinéma n’est pas seulement un clin d’oeil de cinéphile [...] Rarement l’idée de tradition est esquissée avec autant de précision et de concision. Le trajet de la conscience d’un peuple reproduit celui, individuel, de l’enfant, de la cour devant la case jusqu’à la cour de l’école et à un hall de cinéma.
— Olivier Curchod / Positif, n° 273, Novembre 1983

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Montrer sans appuyer
Non seulement la réalisatrice a su garder humour et mesure, mais elle n’assène aucun message. Elle se contente de raconter une histoire, tout simplement, et de montrer sans appuyer. Et, du coup, on est de plain-pied avec ses personnages, au lieu de les regarder de loin, comme dans trop de films du tiers-monde. [...] Et l’on comprend à demi-mot le problème de l’identité antillaise, en le regardant avec les yeux du petit José qui observant tout son entourage se fait exploiter sans rien dire, mais apprenant à revendiquer de plus en plus fort sa personnalité, est bien décidé à ne pas subir d’injustices et à travailler suffisamment (en classe) pour pouvoir, un jour, témoigner [...] Un rare exemple de film adulte, intelligent et sensible sur le colonialisme.
— Annie Coppermann / Les Échos, 22 septembre 1983

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Le Petit prince version martiniquaise
Cette chronique des années de formation d’un jeune Martiniquais est tout autant description sociale que psychologie d’une époque et de personnages à tout jamais marqués par l’Histoire.
Au terme d’un demi-siècle d’ ‘‘évolution’’, l’image coloniale léguée par nos ancêtres n’a pas encore fini d’entacher la réalité présente de ses dangereux clichés.[…] En fait ce film d’auteur, Rue Cases-Nègres est surtout un film au scénario édifiant, à la structure narrative hyper classique et qui diffuse des sentiments que le public s’est fait ou se fera un plaisir de partager. C’est, pourrait-on dire, Le Petit Prince version martiniquaise. […] Euzhan Palcy est avant tout une conteuse qui, dans Rue Cases-Nègres, fait appel à la mémoire collective d’un peuple. Le film assure, grâce à un travail patient avec les acteurs, un jeu naturaliste, un souci de toucher le plus grand nombre, quelques moments d’une grande sensibilité.
— Serge Toubiana / Cahiers du cinéma, n° 352, Octobre 1983

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Un film à entrées multiples
Certains ont dit de Rue Cases-Nègres que c’est une oeuvre charmante faite à la gloire de l’école laïque et obligatoire. Le compliment est vraimentréducteur. Car le propre du film d’Euzhan Palcy est d’être complexe, d’offrir une multiplicité d’interprétations, sans qu’aucune soit satisfaisante. On pourrait en effet tout aussi bien dire que Rue Cases-Nègres est un film amer sur la condition humaine : ou que c’est un film sur la pérennité des rapports d’exploitation à travers l’histoire économique des sociétés ; ou encore que c’est un film nostalgique sur l’enfance ; ou bien que c’est un film sur la fin d’un monde (celui de Médouze) et le début d’un autre (José) ; ou encore que c’est une fable moderne sur le sacrifice et la volonté. C’est un film à entrées multiples, qui ne se laisse pas expliquer d’un seul coup de plume, et qui engendre ses significations à mesure qu’on le prend au sérieux, qu’on l’étudie et qu’on cesse de le regarder comme une oeuvre innocente et jolie. »
— Stéphane Malandrin / Dossier « Collège au cinéma »,n°92, 1998